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Règlement intérieur

En cas de scission de l’entreprise, le règlement intérieur d’origine est-il transmis avec les contrats vers les nouvelles sociétés ?

Dans une affaire de scission d’entreprise avec création de nouvelles sociétés, la Cour de cassation a précisé que le transfert de droit des contrats de travail des salariés affectés à une des nouvelles entreprises ne s’accompagnait pas du transfert du règlement intérieur d’origine, de sorte que l’employeur ne peut pas s’appuyer dessus pour sanctionner des salariés. Il revient à la nouvelle entreprise de mettre en place son propre règlement intérieur, quitte à reprendre les termes de celui d’origine.

Le contexte de l’affaire

Une entreprise de transport de colis s’était scindée en cinq entités différentes, avec transfert « de droit » des contrats de travail des salariés (c. trav. art. L. 1224-1). L'employeur de l’une des nouvelles entités avait sanctionné des salariés sur la base du règlement intérieur appliqué dans l’entreprise avant l’opération de scission.

Un syndicat a contesté l’application du règlement intérieur d’origine dans la nouvelle société issue de la scission, considérant que ce règlement ne pouvait pas être transféré au même titre que les contrats de travail et, qu’en conséquence, il n’était pas opposable aux salariés.

Rappelons qu’en cas de modification de la situation juridique de l’entreprise, tous les contrats de travail en cours doivent subsister chez le nouvel employeur (c. trav. art. L. 1224-1). Ainsi, en cas de scission, le transfert d’une activité constituant une entité économique autonome auprès d’une nouvelle société entraîne automatiquement le transfert des contrats des salariés qui y sont affectés.

Les usages et les engagements unilatéraux à caractère collectif qui existaient chez l’ancien employeur sont également « transférés » auprès du nouvel employeur, qui est tenu de les appliquer tant qu’il ne les a pas dénoncés (cass. soc. 12 mars 2008, n° 06-45147, BC V n° 59).

Dans l’affaire ici jugée, l’employeur considérait que le règlement intérieur d’origine constituait un engagement unilatéral. Pour lui, il avait donc été automatiquement transmis dans la société issue de la scission et pouvait être appliqué aux salariés.

Mais ce n’est pas l’avis de la Cour de cassation.

La solution à retenir

La Cour de cassation a approuvé la cour d'appel d’avoir jugé que le règlement intérieur ne pouvait être qualifié d’engagement unilatéral eu égard à son objet, sa nature réglementaire et son régime juridique et qu’en conséquence, il ne pouvait être transféré chez le nouvel employeur.

Le règlement intérieur s'imposant aux salariés avant la réorganisation de l’entreprise n’était donc pas transférable avec leurs contrats de travail vers la société nouvellement créée.

Par ailleurs, elle estime que la nouvelle société issue de la scission était tenue d’élaborer son propre règlement intérieur, puisque la loi impose à toute nouvelle entreprise de se doter d’un règlement intérieur dans les 3 mois suivants son ouverture (c. trav. art. R. 1321-5).

Au final, l’application du règlement intérieur d’origine a été suspendue et il a été interdit au nouvel employeur de prononcer à l’avenir toute sanction disciplinaire sur son fondement. Cette interdiction a été assortie d’une astreinte de 1000 € par infraction commise.

Pour pouvoir à nouveau exercer son pouvoir disciplinaire, le nouvel employeur devait donc adopter son propre règlement intérieur, quitte à s’inspirer ou reprendre celui d’origine, en suivant les formalités obligatoires (consultation des représentants du personnel, communication à l’inspecteur du travail, dépôt, publicité).

Obligation de mise en place (rappel)

On rappellera que, à l’heure où nous rédigeons ces lignes, la mise en place d’un règlement intérieur est obligatoire dans les entreprises ou établissements d’au moins 20 salariés, seuil que le projet de loi PACTE, en cours d’examen, prévoit de relever à 50 salariés.

Cass. soc. 17 octobre 2018, n° 17-16465 FSPB ; https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/arrets_publies_2986/chambre_sociale_3168/2018_8506/octobre_8986/1469_17_40491.html

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